Le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, participe aux réunions annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international qui se tiennent à Washington entre le 10 et le 13 octobre.
À cette occasion, M. Salamé a convié les hauts responsables des banques internationales et libanaises à Washington à un petit déjeuner à l’hôtel Four Seasons afin de discuter des derniers développements survenus sur la scène bancaire internationale.
S’adressant à ses convives, M. Salamé a souligné que ni le Liban ni le secteur bancaire n’ont été affectés et ne le seront pas par la crise financière internationale, et que celle-ci ne se répercutera point sur la stabilité du crédit au Liban. En effet, la BDL a adopté, au cours des dernières années, une série de mesures visant à consolider la capitalisation des banques, à rationaliser leur travail et à mettre le secteur bancaire à l’abri des pratiques qui ont ébranlé le système bancaire international, et ont obligé les gouvernements et banques centrales à injecter plus de trois trillions de dollars afin de renflouer leur secteur bancaire.
M. Salamé a expliqué que depuis plus de dix ans, la Banque du Liban considère qu’il est nécessaire d’émettre des circulaires préventives qui protègent le secteur bancaire, et que la liberté du marché et le respect de ses règles ne s’opposent pas à l’application de réglementations de prudence. La Banque du Liban a donc émis, au cours des quinze dernières années, des centaines de circulaires qui ont eu pour résultat de protéger financièrement le secteur bancaire et d’y réduire les risques, contrairement aux pays développés dont le seul souci était d’adopter les accords de Bâle I et II afin de protéger leurs propres banques des crises qui étaient prévues dans les pays en voie de développement et qui, en fin de compte, ont éclaté au sein même du monde développé.
Le gouverneur de la Banque centrale a également rappelé que la quasi-faillite du système financier international découlait en partie de l’effet de levier qui s’est traduit par un octroi excessif de crédits pour l’acquisition de fonds et de biens-fonds, la titrisation de ces crédits, la création de produits dérivés liés à ces crédits, le nouvel emprunt contre ces produits dérivés et leur vente sur les marchés, sachant que les principaux dérivés comportent des subprimes et que leur succès est dû à leur taux d’intérêt élevé, comparé aux taux d’intérêt bas appliqués dans l’activité bancaire usuelle.
Par ailleurs, M. Salamé a indiqué que la Banque du Liban avait, depuis longtemps, évité pareille situation en réglementant les activités relatives à ces produits et en les soumettant à une autorisation préalable de son Conseil central, en interdisant au secteur bancaire libanais de s’engager dans les subprimes et d’émettre des garanties sur les dérivés en contrepartie de leurs fonds propres. De plus, la Banque du Liban a adopté une politique de taux réaliste qui freine tout désir de rentabilité excessive à hauts risques, a réussi à contrôler la liquidité grâce à l’émission de divers instruments tels les certificats de dépôt en devises. Et d’ajouter que l’une des causes de la crise internationale a été la faillite d’une banque, voire de banques prestigieuses, chose que nous avons toujours refusée au Liban, et nous poursuivrons notre politique dans ce sens.
Aussi a-t-il rappelé qu’entre 1997 et 2004, et se prévalant des pouvoirs conférés par la loi relative à la fusion des banques, une réforme bancaire a été effectuée, permettant à plus de trente banques de sortir du marché sans que les déposants et les banques correspondantes encourent des pertes. Une ingénierie financière a été mise en place pour financer le coût de cette réforme sans que l’État libanais, la Banque centrale ou l’Institut national de garantie des dépôts ne subissent de pertes et sans engendrer d’inflation. La confiance dont jouit le secteur bancaire libanais ainsi a été renforcée, alors que plus récemment, et suite à la panique qui a secoué les marchés financiers, tous les pays concernés ont procédé au renflouement de leurs banques à un coût très élevé.
Augmentation des dépôts de 500 millions de dollars
M. Salamé a précisé que les marchés avaient approuvé et soutenu cette politique, comme en témoignent la stabilité et la résistance du secteur bancaire au cours des années difficiles que le Liban a traversées ainsi que la croissance de la base des dépôts au Liban qui est censée atteindre 12 % et celles des bénéfices 10 %.
En outre, le patron de la BDL a souligné que la confiance bâtie au fil des ans était réelle et tangible.
En effet, durant la dernière semaine de septembre, donc en une semaine uniquement, et alors que la crise mondiale battait son plein, les dépôts bancaires au Liban ont augmenté de 500 millions de dollars. Par ailleurs, le taux interbancaire est resté stable, s’inscrivant à environ 3 % et allant de pair avec une forte demande sur les bons du Trésor en livre libanaise dont les taux d’intérêt se sont maintenus entre 6 et 9,5 % en fonction de leurs échéances (de 3 mois à 3 ans). Cette stabilité des taux d’intérêt s’est répercutée sur les euro-obligations, et la garantie des risques liés aux crédits s’est stabilisée entre 4,5 % et 6 % depuis le début de l’année.
Les avoirs en devises ont atteint un niveau record, soit environ 18 milliards de dollars, en raison de la baisse de la dollarisation et d’une balance de paiement excédentaire de 2 milliards de dollars.
Et M. Salamé de conclure : « La conjoncture internationale difficile que vit le monde à l’heure actuelle ne nous réjouit point. Nous suivons de près son évolution et nous saluons les démarches responsables entreprises par les gouvernements et banques centrales pour assurer la liquidité nécessaire et garantir les dépôts, en souhaitant qu’elles portent leurs fruits. »